Cher Abraham,
En effet, j'ai toujours pensé que je ne dois pas porter les erreurs de mes sujets, ceux qui nous ont gouvernés et ceux qui veulent une lecture orientée et unidimensionnelle de l'histoire. Je me réjouis que ma nouvelle génération ait ouvret l'esprit pour ne pas se laisser berner par les idéologies de tout bord. Il suffit de prendre son baton, tel un Moïse, et faire un tour de l'Algérie et constater les strates de l'histoire qui se superposent : juifs, chrétiens, berbères, arabes, etc. ont laissé des traces inestimables et incontestables. Sauf l'aveugle, ou celui qui s'acharne dans l'aveuglement, ne veut voir que son égoïsme et sa suprématie.
Je ne peux qu'être admiratif et reconnaissant des traditions multiples qui ont constitué notre identité, une identité plurielle où cohabitent toutes les confessions et les traditions, sans exclusion et sans renégat.
Vous avez raison de signaler que notre défaite est avant tout "culturel", parce qu'on a pas voulu voir les différences qui composent notre histoire. On a voulu à tout prix réduire à néant ces traces (traditions, églises, synagogues, etc.) qui défient le temps et la bêtise des hommes. Le résultat : on a voulu rester entre semblables, mais les semblables finalement se sont déchirés, se sont entretués jursqu'au jour où on a compris, plus ou moins notre génération, que l'autre, l'altérité, n'est pas une menace; que parfois le péril vient de soi-même. Ce n'est plus le dicton de Sartre "Les autres, c'est l'enfer", mais aujourd'hui, on se rend compte, que l'enfer c'est soi-même.
On ne peut être que fier de la richesse de notre histoire et comme vous le disiez, ceux qui pointent l'index pour culpabiliser les autres et rejeter la responsabilité sur eux, cachent une misère latente, une faiblesse non avouée, voire une lacheté.
Sincères salutations.