C'EST ARRIVE LE 21 AVRIL 1961
Dans la nuit du 21 au 22 avril 1961, quatre généraux français à la retraite, Challe, Zeller, Jouhaud, Salan et quelques colonels prennent le pouvoir à Alger . Ils tentent de soulever les militaires stationnés en Algérie ainsi que les Pieds-noirs dans un effort désespéré.
Ils s'opposaient à l'émancipation de l'Algérie, et voulaient par tous les moyens la maintenir à l'intérieur de la République Française.
Des unités de parachutistes prenent le controle d'Alger dans la nuit du 21 au 22 avril.
C'est le putsch d'Alger.
Trois ans plus tôt, le 6 juin 1958 le général Charles de Gaulle avait prononcé à Mostaganem les fameux mots:
"Vive Mostaganem ! Vive l'Algérie française ! Vive la République ! Vive la France !".
Personne à vrai dire ne connaissait la conviction intime du général de Gaulle. Celui-ci s'était dans le passé montré favorable à la colonisation. Mais il est également conscient des nouvelles réalités qui rendent tout autant impossibles l'intégration de l'ensemble des musulmans Algériens dans la communauté nationale Française.
A parti de ce discours maladroit, le doute s'installe dans tous les esprits et dans tous les camps.
Il est à rappeler que le 8 janvier 1961, le peuple Français avait approuvé par un référendum le principe de l'autodétermination des Algériens de toutes conditions :75,25% de oui en métropole et 69,09% en Algérie, et le 30 mars de la même année, le gouvernement Français annonçait officiellement l'ouverture de pourparlers avec les représentants du GPRA (Gouvernement Provisoire de la République Algérienne).
Au même moment , les unes après les autres, les colonies d'Afrique : Cameroun, Togo, Madagascar,... se voient accorder leur indépendance.
Mais en Algérie, beaucoup d'Européens s'inquiètent de leur sort et ne croient pas à une coexistence possible avec la majorité musulmane dans le cadre d'un État Algérien indépendant.
Leur désespoir rejoint celui de nombreux militaires qui entrevoient un nouveau recul de la France après le lâchage de l'Indochine.
Au soir du 21 avril, les généraux rebelles font arrêter le délégué général du gouvernement, Jean Morin, les généraux Fernand Gambiez, Vézinet, commandant le corps d'armée d'Alger, Saint-Hilier, commandant de la 10e division parachutiste, Robert Buron, le ministre des transports. Tout le monde sera transféré au Sahara, à l'Hôtel Atlantique d'In-Salah.
Sept régiments aéroportés, le régiment étranger de cavalerie, se mettent sous les ordres de Challes et quittent leur base pour obliger la grande masse de l'armée d'Algérie à suivre le mouvement.
À l'aube du samedi 22 avril 1961, la radio d'Alger peut annoncer que "l'armée s'est assurée du contrôle du territoire algéro-saharien".
Ils n'arriveront toutefois jamais à rallier les officiers de haut rang à leur cause. Le général de Pouilly, à Oran, prend du champ avec le préfet de région Gély. Le général Ailleret, à Bône, s'oppose au putsch, le général Jean Simon, en Kabylie, s'esquive pour n'être pas capturé. La maison mère de la Légion étrangère, à Sidi Bel Abbès, ne bascule pas, le colonel Brothier ne veut pas mêler des étrangers aux affaires françaises.
A Paris on s'attend à ce que des militaires factieux d'Algérie atterrissent sur les aérodromes métropolitains.
Dans la nuit, le Premier ministre Michel Debré dramatise la situation, non sans échapper au ridicule : «Dès que les sirènes retentiront, allez, à pied ou en voiture, convaincre ces soldats trompés de leur lourde erreur» lance-t-il à la télévision.
Mais les pustchistes échouent en métropole. À Paris, la police arrête dans la matinée le général Jacques Faure, six autres officiers et quatre civils. La préfecture de police, l'Elysée et le ministère de l'intérieur, l'Assemblée nationale et le quartier des ministères devaient tomber aux mains d'éléments militaires et civils en armes. Ceux qui ont obéi aux consignes sont capturés ou se dispersent. Il ne restera du complot que quelques attentats au plastic : un mort à Orly, des blessés à la gare de Lyon. Et bien des inspirations et des complicités inconnues......
Le dimanche 23 avril, Salan arrive d'Espagne, où la police n'a pas réussi à le retenir. Mais Serano Suner, ancien ministre des affaires étrangères de Franco, lui dit : "Vous avez perdu. Les généraux d'Alger n'ont fait fusiller ni Morin ni Gambiez."
Salan prend toutefois en main les problèmes des Européens, Jouhaud étant chargé des musulmans. Challe, quand à lui, se retrouve de plus en plus isolé, il refuse d'armer les activistes civils qui arrêtent à Alger gaullistes et libéraux.
Le jour même à 20 heures, le général de Gaulle apparaît en uniforme à la télévision et lance des mots qui font mouche :
"Un pouvoir insurrectionnel s'est installé en Algérie par un pronunciamiento militaire. Ce pouvoir a une apparence : un quarteron de généraux en retraite... Au nom de la France, j'ordonne que tous les moyens, je dis tous les moyens, soient employés pour barrer la route de ces hommes-là... J'interdis à tout Français et d'abord à tout soldat d'exécuter aucun de leurs ordres...".
Il conclut : "Françaises, Français, aidez-moi."
"Cinq cent mille gaillards munis de transistors", comme il dit du contingent, ont entendu cet appel à la désobéissance légitime. Les appelés réclament de leurs chefs qu'ils prennent position pour Paris, refusent d'exécuter leurs ordres. Plusieurs officiers ont pris le maquis et somment leurs camarades de rentrer dans la légalité.
Les syndicats décident pour le lendemain une grève générale d'une heure, qui sera massivement suivie. Le lundi matin, les jeux sont faits. C'en est fini de l'insurrection algéroise.
Cinquante avions de chasse et de transport regagnent la métropole. Le général André Martin chef d'état-major des armées, dira : "Challe sait qu'il a perdu. Il va redistribuer les cartes en renvoyant les unités à leur point de départ et rentrer en France."
Le mardi 25 avril, contre l'avis des trois autres généraux, Challe prend contact avec Paris. Lentement, le 1er REP et son chef, toujours fidèles à Maurice Challe, repartirent pour leur cantonnement de Zeralda. Saint Marc se constitua prisonnier.
Challe se livra et fut aussitôt transféré en métropole. Salan et Jouhaud prirent la tête de l'OAS créée à Madrid deux mois plus tôt.
L'armée n'avait pas "basculé" et ne basculera pas. Seuls parmi les cadres, les partisans acharnés de l'Algérie française entrent dans la lutte clandestine. Malgré la folie destructrice et sanglante de l'OAS, la voie était ouverte au général de Gaulle pour le désengagement de la France en Algérie.
Le putsh a lamentablement échoué en quatre jours mais les assassinats ne s'arrêteront pas là.