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Solidarité avec les victimes d'Alger et des autres localités touchées par les innondations

 

SoliMed Algérie lance un appel à la mobilisation en faveur des victimes des innondations du samedi 10 novembre qui ont durement touché Alger et d'autres localités algériennes.
 
Notre local est à votre disposition pour recevoir couvertures, vêtements chauds (enfants et adultes), bottes et chaussures, lait bébé, friandises et jouets.
 
Merci d'emballer vos dons dans des cartons ouverts (non scotchés).
 
Notre local est situé au 1, rue Jean Pigeon, Charenton-le-Pont, 942220. Merci de prendre rendez-vous avec l'association qui nous héberge ARPPE au
01 43 75 84 27 avant de déposer vos dons.
 
Ceux qui souhaitent faire une contribution monétaire peuvent envoyer un chèque à SoliMed au 68, bd Soult, 75020, Paris.
 
Un membre de SoliMed supervisera la distribution des dons à Alger.
 
Merci de faire circuler ce message.
 
L'équipe de SoliMed Algérie
 
 
 
 
El Watan, 14/11/2001
 

Hier encore, dans certaines rues de Bab El Oued et au marché Triolet, le déblayage se faisait à la pelle pour ne pas abîmer les cadavres. A partir d’aujourd’hui, c’est avec de gros engins que se poursuivra l’opération.

Alors que le bilan avait atteint hier 610 morts à Alger, les équipes de secours ont retiré 81 corps dans une usine de tabac à Bab El Oued et poursuivaient les recherches pour en déterrer les dizaines d’autres ensevelis dans ces mêmes lieux. Hier en milieu d’après-midi, le nombre de décès enregistrés a atteint, selon le ministre de l’Intérieur, 604, auxquels il faut ajouter six autres victimes découvertes en fin de journée. Ainsi, en cinq jours seulement, 610 corps ont été retirés des décombres alors que le nombre des disparus a dépassé les 500, selon la police. Sur les lieux, les secouristes ont découvert un véritable charnier à l’intérieur de l’usine de la SNTA, Boufenara, située en contrebas de la cité Groupe Taine, à Bab El Oued. «Sous ces ballots de tabacs et ces tonnes de boue, des dizaines, peut-être des centaines de personnes ont été ensevelies. En moins de vingt-quatre heures, nous avons retiré 81 corps», déclare un agent de la Protection civile rencontré sur place.
Ce matin même, les corps d’une femme enceinte, accrochée à ceux de ses trois enfants âgés entre 5 et 12 ans, ont été retirés. La vue de ces corps nus, gonflés par l’eau et recouverts de boue en a bouleversé plus d’un. La pauvre mère s’est accroupie, entourée de ses gosses, juste à côté d’un pilier de l’usine au milieu des sacs de tabac. L’immense hangar, détruit partiellement, est devenu un véritable cimetière. Depuis la découverte du premier cadavre mardi matin, les équipes de recherches ont été renforcées par des militaires et des agents de la Protection civile. Durant la nuit du mardi à mercredi, les secouristes ont déterré 57 corps, dont ceux de 27 femmes alors que pour la seule matinée d’hier ce sont  24 cadavres, dont ceux de six femmes, qui ont été retirés. «Je crains que ce soit un véritable charnier. La présence des sacs de tabac et de la boue rend difficile les recherches. Les victimes sont de personnes emportées par les eaux. Certaines ont été projetées à l'intérieur et d’autres s’y sont réfugiées pensant être à l’abri. Nous avons travaillé toute la nuit, c’était indescriptible. C’est vraiment une hécatombe», lance un jeune citoyen qui participe aux recherches.
Le bain maure de la mort
Choqués par les va-et-vient incessants des ambulances transportant les corps des victimes, les riverains suivent avec angoisse l’opération. «J’étais impuissant devant ces femmes et ces enfants, dont les corps étaient violemment emportés par les eaux. Ce sont des images qui ne veulent pas quitter mon esprit et je vois encore les visages de ces pauvres gens ...», raconte, la gorge nouée, un jeune homme, qui était à son balcon au quatrième étage au moment du drame.
Plus bas, les habitants continuent à déblayer la chaussée. La rue Rachid Kouache, ex-Léon Roche, est toujours enterrée sous près de deux mètres de terre et de gravats. Certaines carcasses de véhicules ont été déplacées, mais beaucoup d’autres jonchent encore les rues. Les deux camions qui obstruaient l’entrée du quartier ont été dégagés. Complètement sinistrés, les habitants de la rue Rachid Kouache sont tous hébergés dans l’enceinte de l’APC de Bab El Oued. Une partie composée d’une trentaine de familles a été relogée alors que plus de deux cents autres restent sans abri. Ils ont d’ailleurs transmis une lettre aux autorités les appelant à trouver rapidement une solution afin que tout le monde ait un toit. A quelques mètres de ce quartier, le lampadaire qui supporte les trois horloges, au centre de Bab El Oued, a résisté à la puissance des flots. Il reste le témoin de la mort atroce de nombreux citoyens emportés par le déluge.  Si certains corps ont pu être repêchés, le sort de beaucoup d’autres n’est pas connu. Des portraits de personnes disparues sont affichés sur les murs de ce vieux quartier. De retour vers Triolet, nous rencontrons l'équipe de secouristes français. Elle vient juste d’entrer en action au marché, où l’odeur de corps en décomposition commence à se répandre. Un masque autour du nez et de la bouche, les équipes de recherches travaillent toujours avec des pelles. «Nous voulons retrouver les corps des victimes. C’est pour cela que nous travaillons manuellement», précise un pompier. Un officier déclare cependant que les gros engins seront déployés à partir d’aujourd’hui pour raser tout le marché. «Nous ne pouvons plus attendre longtemps. A partir d’aujourd’hui, les engins feront leur travail...». A 500 m de ce marché, une foule importante s’est agglutinée autour d’un bain maure. «Je sais qu’ils sont tous à l’intérieur. J’ai vu de nombreux enfants affolés courir vers ce bain maure et descendre au sous-sol», révèle un sexagénaire habitant le quartier. Le propriétaire de ce commerce reconnaît qu’il héberge des jeunes sans pour autant donner leur nombre. «Ils viennent le soir pour y passer la nuit et repartent le matin», dit-il apeuré. Une pompe de refoulement est mise en marche pour évacuer l’eau ayant inondé le sous-sol. C’est à cet endroit précis que les pauvres victimes ont été piégées. L’odeur de putréfaction se dégage fortement au fur et à mesure que l’on se rapproche des lieux. Jusqu’en début d’après-midi, l’eau emplissait toujours le bain maure. Impossible de retirer les corps. Dans la tente qui sert de poste de commandement et de coordination des recherches, 143 cas de disparition ont été enregistrés en trois jours (auxquels il faut ajouter la liste des hôpitaux et de la morgue d’El Alia). Sur les hauteurs, à quelques centaines de mètres de là, le cimetière El Kettar ne désemplit pas. Les processions funèbres se poursuivent tout au long de la journée.

Par Salima Tlemçani

Sommaire


AVEC LES SINISTRES DE OUED KORICHE / Une nuit en enfer

Elles sont près de 500 personnes à être casées dans le hall de l’état civil de l’APC de Oued Koriche.

Il est plus d’une heure du matin, et hommes, femmes et enfants ne sont toujours pas couchés. C’est que tous n’ont pas de couvertures. Beaucoup passeront la nuit dans le couloir... Il est 23 h 30 quand le groupe de jeunes, à l’entrée du bâtiment, a eu à manger. Du pain, du fromage, une bouteille d’eau minérale. Il fait environ 10°. On aurait dit qu’ils étaient en train de faire une partie de dominos sur le marbre froid. Le deuxième groupe, quant à lui, a un pied dans l’immeuble. Les hommes, les jeunes, dont l’âge varie entre seize et soixante ans, vont et viennent, sans but apparent, dans une sorte de cacophonie. Tous parlent en même temps. Mais les voix sont assourdies, étouffées. On comprend bien qu’ils sont gênés, inquiets. Tous semblent attendre quelque chose. Sans doute cherchent-ils à retrouver leurs anciennes habitudes.
Le froid ne semble pas être le premier de leurs soucis. Les fenêtres du couloir et du hall sont pratiquement toutes cassées, mais cela ne dérange pas outre mesure. Les vêtements de tous les jours font l’affaire. Par ailleurs, cela sert aussi à libérer l’odeur nauséabonde d’urine. L’autre partie du couloir est en effet transformée en urinoir pour les hommes. «Où voulez-vous qu’on fasse nos besoins ?», se plaint un des pensionnaires, avant d’ajouter : «Pour cela chacun fait comme il peut, on n’a pas accès aux toilettes de l’APC...» Dans le hall de l’état civil, il est vrai que chacun fait comme il peut. Les femmes, de tous âges, les enfants, des deux sexes, font tout sur place. Au milieu des matelas, des couvertures, des chaises, des fauteuils et autres bancs qui servent de lit à l’occasion. Parmi les chaussures, les bouteilles de lait, les morceaux de pain et autres fichus sur lesquels dorment des enfants. Les petites têtes dorment d’un sommeil profond malgré le bruit, les cris, les appels, malgré les pieds qui risquent à tout moment de les écraser. Le moindre espace a été pris d’assaut. Pour tous, la devise est que chacun reste à sa place. «Nous mangeons ici, dormons ici, et faisons le reste ici...», confie une jeune femme enceinte de deux mois. C’est alors qu’une femme prend son bébé contre elle pour lui donner le sein. Elle n’ose pas lever la tête. Les maris, les frères sont là, derrière la vitre : ils regardent, ils veillent. Même l’accès à la pièce est conditionné par la présentation d’une justification. Un contrôle de police en bonne et due forme. Et puis, il y a aussi les autres, les voisins, ceux de toujours et ceux d’un soir. Le jeune qui nous sert de guide parmi cette marée humaine ne cesse de nous tirer par la main, de nous pousser dans les coins, ils veut tout nous faire voir : «Tu vois ce qu’ils ont fait de nous. Nous sommes entassés comme des animaux... Regarde les enfants, là, ils n’ont pas de couvertures... Ceux-là, il est une heure passée et ils ne se sont toujours pas couchés... Cette femme-là souffre des reins, l’autre est asthmatique, la vieille à côté est cardiaque...» Une femme l’interrompt : «Si mon bébé continue à vomir, ils vont certainement l’évacuer, c’est ce qu’ils m’ont dit...» Mais il n’y a pas de médecin. Il n’y a aucune équipe médicale pour prendre en charge tout ce beau monde. L’équipe du Croissant-Rouge installée en contrebas du siège de l’APC, constituée de seulement 5 membres, ne peut apporter que les premiers soins. «Nous recevons parfois des dons venant de la part des citoyens, mais c’est l’équipe du jour qui se charge de leur distribution ; par ailleurs, nous n’avons ni ambulance, ni radio, ni médecin parmi nous, nous nous en référons à l’officier de police qui garde le bâtiment pour évacuer les cas d’urgence.» Des cas d’urgence, il y en a eu justement trois, hier, dus à une intoxication : une femme, son mari et un enfant en bas âge. Selon les éléments du Croissant-Rouge, les victimes auraient pris des haricots, des œufs... Selon les autres sinistrés, la nourriture distribuée serait tout simplement périmée. «Les denrées stagnent pendant deux à trois jours avant de nous parvenir...»

Le corps médical à pied d’œuvre

Les équipes médicales des structures hospitalières d’Alger sont toujours à pied d’œuvre. Le personnel de l’hôpital Maillot, situé tout près des lieux du drame à Bab El Oued, continuait hier d’opérer inlassablement dans l'espoir mince, il faut le dire, de trouver peut-être des rescapés.

Cet hôpital qui a réceptionné pas moins de 400 personnes décédées ainsi que des centaines de blessés a vu le rythme de ses équipes médicales décupler sous la pression des admissions constatées après le drame. Les membres de l’équipe, composée de 22 médecins spécialistes et généralistes, se relaient pour apporter les soins ou encore le soutien moral aux hospitalisés. Pour l’instant, 15 personnes sont toujours hospitalisées au niveau de cette structure sanitaire. Toutefois, le personnel médical reste à l'affût d’une présence de cas de MTH maladies à tranmsission hydrique (MTH), ou encore d’infections. L’hôpital de Birtraria, vers où ont été évacuées 53 personnes décédées, a également réceptionné 88 blessés. Parmi ces derniers, deux personnes sont encore en observation et soins intensifs. Cependant, le plus gros travail du personnel de cet hôpital se fait sous forme d’assistance prodiguée par les équipes de médecins épaulés par deux psychologues qui se relayent 24 h sur 24 h. Ces derniers opèrent notamment au niveau des neuf centres d’accueil abritant actuellement 1770 sinistrés. Toutefois, le personnel médical de cette structure hospitalière a eu à relever le manque de moyens et de coordination avec les services concernés (APC et wilaya). «Les rescapés souffrent actuellement du manque de nourriture, de chauffage ou encore d’absence de sanitaires, ce qui, à l’évidence, constitue un terreau pour toutes sortes d’affections et d’épidémies», craint un membre de l’hôpital. «Nous avons constaté jusqu’a présent des syndromes grippaux ainsi que beaucoup de cas de diarrhées dues aux conditions d’hébergement dans les centres d’accueil», poursuit notre interlocuteur. Enfin, l’hopital Mustapha a été littéralement pris d’assaut durant la journée d’hier. Ce sont pas moins de 500 citoyens qui se sont présentés spontanément pour faire don de leur sang au profit des victimes de la tragédie. «Notre personnel a été littéralement submergé par l’afflux de centaines de citoyens venus donner un peu d’eux-mêmes», nous déclare M. Dahar, directeur général de l’hôpital Mustapha Bacha. Rappelons que huit personnes sont toujours en soins dans cet établissement. 40 personnes évacuées d’urgence de l’hôpital de Birtraria y ont également été prises en charge. Notons enfin que l’hôpital Mustapha supplée le service maternité de la clinique Gharafa (ex-Durando) de Bab El Oued rendue inopérante après les inondations.

Par Rezki S.

 
DJAMEL CHIKHI [dchikhi@free.fr
 
 

 

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