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" COLONIALISME DE PEUPLEMENT "

Envoyé par david28 
" COLONIALISME DE PEUPLEMENT "
05 février 2016, 00:27
Pour transformer les Juifs en Européens en Asie, le sionisme leur proposait un éventail de professions qui leur avaient périodiquement fermées durant leur résidence en Europe, notamment dans les domaines agricoles et militaire; il fit d'eux tout à la fois des travailleurs productifs et des "sabras" (1) virils et conquérants.

Ces possibilités leur étaient offertes par une terre asiatique revendiquée comme héritage transmis aux Juifs modernes par ceux qui étaient considérés comme leurs "ancêtres hébreux".

L'une des principales tâches que s'assigna le projet sioniste fut d'ailleurs l'organisation de fouilles archéologiques destinées à étayer l'avenir des Juifs par le passé des Hébreux.(2)

Le sionisme comprenait que pour devenir européens, les Juifs ne pouvaient plus s'identifier en termes tribaux ou religieux; il leur fallait désormais le faire en termes de race et de nationalité.

C'est dans ce contexte que les origines religieuses du judaïsme devinrent des origines nationales et raciales et que les anciens rois hébreux devinrent les ancêtres des Juifs modernes.

Ceci s'accomplit au début du siècle par l'investissement sioniste dans la nouvelle science statistique, laquelle, incorporée à ce qui était jusqu'alors connu sous le nom de Wissenschaft des Judentum ("science du judaïsme"winking smiley en fit une Jüdische Wisdenschaft ("science juive"winking smiley.

Arthur Ruppin dirigeait le Bureau des statistiques juives, installé à Berlin dès 1904 afin de démontrer scientifiquement comment les Juifs formaient un Volk et une race. (3)

Ruppin s'intéressait grandement à l'eugénisme et avait remporté un "prix important" pour une étude en génétique. (4)

Dix ans plus tard, il fut nommé représentant de l'exécutif sioniste en Palestine. (5)

D'après une récente étude du chercheur israélien Shachlav Stoler-Liss, pendant toutes les années 1930, des membres éminents de l'establishment médical sioniste en Palestine défendirent le principe de la castration des malades mentaux, souhaitant encourager la reproduction au sein des familles " qui comptent parmi l'intelligentsia", tout en limitant l'extension des "familles d'origine orientale" (mizrahies) et "empêcher [...] les vies dépourvues de finalité". (6)

Le journaliste du quotidien israélien Ha'aretz s'étonne de ce que "ces propositions ne proviennent pas de quelque programme du Troisième Reich, mais sont bien le fait de personnages clé de l'establishment sioniste en Eretz Israël pendant la période du Mandat britannique". (7)

Ces idées allaient pourtant continuer à conduire le mouvement sioniste jusqu'à nos jours, s'exprimant avec la plus grande clarté dans la quête contemporaine de "marqueurs génétiques" Juifs. (8)

BLUT UND BODEN

Ce sont les principes nationalistes européens Blut und Boden ("le sang et le sol"winking smiley qui guidèrent l'invention sioniste des Juifs comme nation possédant sa propre terre.

Le premier point à l'ordre du jour allait donc consister à coloniser une telle terre pour s'y installer.

La nahalat avot, la "terre ancestrale", désert asiatique "désolé" et "en déshérence", les colons juifs allaient en faire une terre européenne verdoyante, florissante, couverte d'arbres et forêts - inépuisable sujet de fierté pour les Juifs israéliens.

Altneuland, Le roman futuriste de Herzl, n'a pas seulement servi de plan fantastique à cet effet.

L'image même du Juif comme vecteur de la civilisation européenne des Gentils dans une géographie barbare est constitutive de l'argumentaire politique sioniste.

Ces dans ces termes que Haïm Wiezmann formula le projet en 1930 :

"[Nous] souhaitons épargner aux Arabes autant que possible les souffrances que subit toute race arriérée à l'arrivée d'une autre nation plus avancée" (9)

Quand les Palestiniens décidèrent de résister â cette "mission civilisatrice", Weizmann, futur premier président de l'Etat d'Israël, caractérisa ainsi les tâches qui attendaient le sionisme dans la répression de cette résistance :

"D'un côté des forces de la destruction, les forces du désert se sont levées, et de l'autre côté les forces de la civilisation et de l'édification tiennent fermement. C'est la vieille guerre du désert contre la civilisation, mais nous ne nous laisserons pas arrêter." (10)

En effet, personne ne les arrêta.

Ils détruisirent une part importante de la société palestinienne et expulsèrent la majeure partie de sa population.

L'ANGOISSE DES TRACES

Le sionisme resta cependant travaillé par une grande inquiétude quant aux traces significatives qui restaient des Palestiniens et aux traces supposées des Hébreux qu'ils s'obstinaient à vouloir exhumer.

LA FABRICATION D'UN PASSÉ

Ainsi les mots désormais célèbres de Moshé Dayan sur ce qui était arrivé aux villes palestiniennes ne nous parlent pas seulement de la destruction du passé non-juif de la Palestine, mais aussi de la production d'un passé juif amalgamé au passé hébraïque :

Des villages juifs ont été construits à la place des villages arabes.

Vous ne connaissez même pas les noms de ces villages arabes et je ne vous le reproche pas, parce que ces livres de géographie n'existent plus.

Non seulement les livres n'existent pas, mais les villages arabes non plus ne sont plus là.

Nahalal est apparu à la place de Mahboul, Gvat à la place de Jibta, Sarid à la place de Haneifa et Kfar Yehoshuah à la place de Tel-Shaman.

Il n'y a pas un seul endroit construit dans ce pays qui n'ait pas eu auparavant une population arabe. (11)



COMITÉ ISRAÉLIEN DES NOMS DE LIEUX



Cette opération palimpsestique n'eut rien d'arbitraire, mais fut au contraire soigneusement planifiée dès le début de la colonisation, avec la création du " Comité des noms de lieux" du Fonds national juif, rebaptisé après 1948 "Comité israélien des noms de lieux". (12)

Israël continua sans état d'âme à changer les toponymes après l'occupation de la Cisjordanie et de la Bande de Gaza. (13)

Les nouveaux noms restèrent après les accords d'Oslo.

La Cisjordanie porte toujours ses noms sionistes exhumés, "Judée et Samarie", des noms utilisés dans le parler gouvernemental et journalistique, non seulement par les dirigeants et les partisans du Likoud, mais aussi par ceux du Parti travailliste.

Non seulement les nouveaux noms exhumés sont restés, mais le projet colonial qui avait été la force motrice initiale du sionisme n'a rien perdu de sa vigueur.

Depuis 1948, l'implantation coloniale sioniste a transformé le territoire palestinien en érigeant de nouveaux bourgs et de nouvelles villes sur les ruines et les traces palestiniennes.

Des colons juifs européens s'installèrent dans les lieux palestiniens qui n'avaient pas été détruits et les convertirent en localités juives européennes.

Évoquant les premiers efforts de la colonisation des survivants de l'Holocauste à leur arrivée en Palestine, l'historien israélien Tom Segev écrit:

[...] La guerre d'Indépendance éclata et des dizaines de milliers de logements furent disponibles.

[...] Des centaines de milliers d'Arabes prirent la fuite et furent expulsés de chez eux.

Des villes entières, des centaines de villages se vidèrent de leur habitants et furent repeuplés en bonne et due forme par les nouveaux venus.

En avril 1949, ces derniers étaient au nombre de 100000, la plupart survivants du génocide.

Ce fut à la fois un moment dramatique de la guerre et une bataille d'une effrayante banalité pour l'acquisition de maisons et de meubles.

Des hommes libres, les Arabes, partirent en exil comme de misérables réfugiés; et de misérables réfugiés, les Juifs, s'emparèrent des maisons des exilés pour commencer leur nouvelle vie d'hommes libres.

Les uns perdaient tout ce qu'ils possédaient au moment où d'autres trouvaient ce dont ils avaient besoin - des tables, des chaises, des armoires, des pots, des casseroles, des plats, parfois des habits, des albums de famille, des livres, des radios et des animaux domestiques.

La plupart des immigrants investirent les maisons arabes abandonnérs dans le désordre et l'anarchie et sans autorisation légale.

Pendant plusieurs mois, le pays fut pris d'une frénésie de "prenez tout ce que vous pouvez", "premier arrivé, premier servi".

Par la suite, les autorités s'efforcèrent d'arrêter le pillage et exercèrent un contrôle sur la répartition du logement, mais c'était en général trop tard.

Les immigrants prirent également possession des magasins et des ateliers arabes; bientôt certains quartiers arabes commencèrent à ressembler à des villes juives de l'Europe d'avant-guerre, avec des tailleurs, des cordonniers, des droguistes, des métiers juifs traditionnels. (14)

Le sionisme allait continuer à faire de ces villes des localités entièrement européennes, ajoutant une saveur hébraïque à la nouvelle identité juive.

Non seulement il se réappropria l'histoire laïque et religieuse des Hébreux dont la philosophie religieuse avait été confisquée par le protestantisme européen, mais à la faveur de ses engagements européens, il dirigea en bloc le douteux héritage grec de l'Europe.

COLLIMATION JUDÉO-CHRÉTIENNE

C'est dans cet esprit que la division schismatique fut colmatée après la Seconde Guerre mondiale sous l'appellation d'héritage "judéo-chrétien" commun à tous les civilisés. (15)

La question palestinienne persista pendant toute l'histoire pré-étatique du sionisme, à la fois comme question nationale et comme question territoriale.

FORCING COLONIAL

La création de l'État d'Israël en 1948 déclencha un processus de colonisation ininterrompu, l'occupation de la Cisjordanie et de la bande de Gaza en 1967 marquant une intensification de cet effort qui a pris une impulsion encore plus forte depuis la signature des accords d'Oslo, le nombre de colons juifs installés dans les territoires-toujours-occupés ayant doublé depuis 1993.

Mais de même que la colonisation sioniste, la résistance palestinienne se poursuit.

La question palestinienne dure donc aussi longtemps que dure l'aventure sioniste.



Notes :

(1) Le terme arabe "sabra" renvoie aux enfants nés en Palestine des colons juifs européens. Le mot désigne le cactus qui, dit-on, ressemble au Nouveau juif (invariablement masculin) "dur en dehors et tendre en dedans"

(2): Sur les fondements idéologiques et la pratique effective de l'archéologie israélienn, voir Nadia Abu El-Hajj, facts on the Grouns Archeaeogical Pratice aind Territorial Self-fashioning in Israeli Society, Chicago, Univerdit y of Chicago Press, 2001.

(3): Cf. Mitchell B. Hart, Social Science and the Politic of Modern Jewish Identity, Stanford, Stanford University Press, 2000, pp. 56-73.

(4): Cf. Walter Larqueur, Histoire du sionisme, Calman-Lévy, 1973, p.230.

(5): Ibid.

(6): Cité par Tamara Traubmann, "Do Not Have Children If They Won't Be Healty", Ha'aretz, 11 juin 2004.

(7): Ibid.

(8): Sur la recherche sioniste de "marqueurs génétiques" juifs et sur l'inlassable investissement du mouvement dans la séparation raciale des Juifs, voir Nadia Abu El-Haj; voir aussi Joseph Massad, The Ends of Sionizm : Racism and the Palestinian Struggle, interventions, volume 3, 2003.

(9): Cité par Simha Flapan, Sionizm and the Palestunians, Londres, Croomhelm, 1979, page 71.

(10): Colonial Office [CO] 733/297/75156/II/Appendis A, extrait du discours de Weizmann, 33 avril 1936, Grande-Bretagne, Rapport de la Commission Peel, pp. 96-97, cité pzr Philip Mattar, The Mufti of Jerusalem : Al-Hajj Amin-al-Husayni and the Palestinian National Movement, New York, Columbia Universty Press, 1988, page 73.

(11): Ha'aretz, 4 avril 1969, cité par David Hirst, The Gun, page 221.

(12): Cf. Saul Cohen et Nurit Kliot, " Israel's Place-Names as Reflection of Continuity and Change in Nation Building", in Names: Journal of the American Name Society, 29:3 ( septembre 1981. Le Fonds national Juif était et est toujours l'organisation sioniste qui possède toutes les terres juives "achetées" en Palestine.

(13): CF. Saul Cohen et Nurit Kliot, " Place-Names in Israel's Ideological Struggle over the Administered Territories", in Annual of the Association of American Geographers, 82:4 (1992)

(14): Tom Segev, Le septième Million, 1993, p. 197.

(15): Survles origines du néologisme "tradition judéo-chrétienne", voir, Novick, l'Holocauste dans la vie américaine, Gallimard, 2001, p. 40.

(16): Cf. Ella Sohat, Israeli Cinema: East/West and the Politics of Representation, Austin, University of Texas Press, 1989; et Le sionisme Di point de vue de ses victimes juives, La Fabrique, 2006.

(17): L'image du "quartier difficile" est l'une de celles qu'affectionne l'ancien - et premier ministre Benyamin Netanyaho. Voit, par exemple, sa discussion avec secrétaire d'Etat américaine Madeleine Albright Le 14 novembre 1997 à Londres, où il explique : "Nous vivons dans un quartier difficile". La transcription de cet entretien est disponible sur le site de l'Ambassade des USA en Israël www.usembassy-israel.org.il/publish/peace/archives/1997me1114b.html, consulté le 20 novembre 2002.

In, La persistance de la question palestinienne, Josef A. Massad, La Fabrique, 2009.



Choix et découpage, intertitres, E'M.C.
Re: " COLONIALISME DE PEUPLEMENT "
05 février 2016, 00:35
D'après le site médiapart.

Y a eu une résolution pour partager la palestine entre les juifs et les arabes avec la création de deux états. Ils ont refusé....

Je ne vois pas où est le colonialisme
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